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Rouge-gorge sur une branche

Circonstances de l'apparition des douleurs chroniques

Il est très intéressant d’analyser les prochaines données fournies par l’étude du Dr. Jasson.  (1) Elles font référence aux « circonstances d’apparition de la fibromyalgie déclarée », que, comme nous verrons, sont dans 69% des cas liées à des évènements traumatiques, à des situations qui donnaient lieu à faire un deuil car une perte importante, physique, psychique ou morale avait eu lieu.

Les autres patients ayant répondu à cette étude (22%), n’ont pas su donner une réponse sur l’évènement qui aurait pu déclencher leur maladie. Je me permets ici de faire un lien avec l’alexithymie, dont il est probable que 22% des patients - ou une partie de cette tranche - aient été atteints sans le savoir, raison par laquelle ils n’ont pas su identifier le ou les évènements ayant survenu (s) avant que leur fibromyalgie ne se déclenche.

Les traumatismes qui déclenchent les douleurs chroniques

 

Dans l’étude du Dr. Jasson, les patients interrogés attribuent le déclenchement de leur maladie à :

  • dans 46 % des cas (918), à un stress émotionnel (deuil, divorce, problèmes familiaux, perte d’emploi, ...)

  • dans 23 % des cas (465), à un stress physique (chute, accident ; trauma du rachis souvent cité).

  • 22 % des patients n’ont noté aucun événement particulier avant le déclenchement de la maladie, ou ne savent pas clairement nommer son origine, ou l’ignorent.

Les violences physiques et sexuelles faites aux femmes

 

Un rapport de l’OMS  (2) sur les violences physiques et sexuelles faites aux femmes, dénonce les estimations mondiales suivantes : 35% des femmes, soit près d'1 femme sur 3, indiquent avoir été exposées à des violences physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire intime ou de quelqu’un d’autre au cours de leur vie.

 

L’OMS cite « La violence d’un partenaire intime et la violence sexuelle entraînent à court et long terme de graves problèmes de santé physique, mentale, sexuelle et génésique pour les victimes et leurs enfants et elles ont de ce fait des coûts sociaux et économiques élevés. »

Parmi ses conséquences sur la santé, l’OMS indique « … Ces formes de violence peuvent entraîner des dépressions, des états de stress post-traumatique, troubles anxieux, des troubles du sommeil, de l’alimentation, des troubles psychiques et des tentatives de suicide.

 

Les femmes ayant subi des violences de la part de leur partenaire intime sont presque 2 fois plus nombreuses à connaître des problèmes de dépression ou d’alcoolisme. Ce chiffre est encore supérieur pour les femmes qui ont subi des violences de la part de quelqu’un d’autre. Les effets sur la santé peuvent être des céphalées, des douleurs du dos, des douleurs abdominales, des fibromyalgies, des troubles digestifs, une mobilité réduite et un mauvais état de santé général »

 

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Comment la douleur se grave -t-elle dans les neurones ?

Près d’un adulte sur cinq souffre de douleur chronique : mal de dos, de tête, douleur post-chirurgicale inexpliquée…en cause : une modification du circuit neuronal de la douleur, qui est alors « mémorisée » dans les neurones.

Selon le professeur de neurophysiologie de l’École supérieure de physique et de chimie industrielle, Bernard Calvino,  « une forme de mémorisation se développe aussi à l’échelle de la cellule, notamment du neurone, qui voit son activité électrique modifiée, sur le long terme. On parle de potentialisation à long terme (ou ltp pour long term potentiation). Or ce processus existe tout le long du circuit neuronal et cérébral de la douleur. Une des propriétés fondamentales du système nerveux central, à savoir le cerveau et la moelle épinière, dans le traitement de l’information est sa capacité à stocker les données par des changements à long terme, grâce à sa plasticité. Cette forme d’apprentissage existe tout le long du circuit de la douleur (3).

 

Les neurones des nerfs périphériques sensoriels dits nociceptifs, qui réagissent à une stimulation douloureuse, et ceux de la moelle épinière dits de la corne dorsale, qui transmettent ensuite l’information au cerveau, subissent des modifications d’activité électrique associées à la douleur. Mais parfois ils amplifient les messages douloureux de façon aberrante, car ils ont été sujets à un « apprentissage électrique et moléculaire », la ltp, semblable à celui mis en œuvre dans les neurones de l’hippocampe, siège de la mémoire, lors de la formation des souvenirs » (2).

 

Jean Pascal Lefaucheur  a expliqué que « lors d'une blessure, par exemple, les nerfs transmettent au système nerveux central – le cerveau et la moelle épinière – des informations dites nociceptives, et ces centres cérébraux supérieurs déclenchent alors des réactions de protection et de réparation. Mais parfois, l’activation de ces centres cérébraux  – et donc la sensation douloureuse – persiste alors que la stimulation nociceptive a disparu.

 

 

Pourquoi la sensation douloureuse persiste alors que la stimulation nociceptive a disparu?

 

Notamment parce que la douleur modifie la force des connexions entre neurones dans certaines régions du système nerveux central, en particulier la corne dorsale de la moelle épinière, là où arrivent les fibres nerveuses périphériques. Une « mémoire » de la douleur s’inscrit dans ces neurones via un mécanisme de plasticité neuronale nommé potentialisation à long terme : plus la connexion entre deux neurones est stimulée, plus elle se renforce et plus elle reste active sur le long terme ou est facilement activée lors d’une stimulation ultérieure » (4).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le Prof. Calvino ajoute « la ltp représente donc un mécanisme moléculaire de stockage à long terme des informations et interviendrait dans la capacité des neurones de la moelle épinière à entretenir la douleur et à la mémoriser. La persistance de cette trace mnésique dépend de mécanismes cellulaires et moléculaires complexes, en particulier de la synthèse de multiples protéines dans les neurones » (3).

La ltp dans la moelle épinière augmente la réaction des neurones nociceptifs par rapport à leur réponse physiologique de base, et représente un processus clé de sensibilisation centrale par lequel une douleur aiguë évolue vers une douleur chronique. Certains mécanismes ainsi installés persistent parfois longtemps après la disparition de la cause initiale de la douleur, plusieurs mois, voire des années.

Notre cerveau enregistre nos perceptions douloureuses

 

Une telle plasticité à long terme ne se limite pas à la moelle épinière… Tout le réseau cérébral de la douleur peut être concerné. Ainsi, l’équipe de Frode Willoch et de Trine Hjørnevik, de l’université d’Oslo, a mis en évidence une ltp au niveau de l’amygdale, et celle de Min Zhuo, de l’université de Toronto, au niveau du cortex cingulaire antérieur; ces deux structures sont des relais cérébraux de la sensation de douleur impliqués notamment dans les aspects émotionnels. Cette phase tardive de la ltp fonctionnerait comme un amplificateur en cascade, augmentant le signal douloureux à chaque relais synaptique (5).

Ces travaux sont forts intéressants, ils proposent une piste qui expliquerait la plasticité neuronale aussi au niveau de l’amygdale, principale aire de stockage des  souffrances émotionnelles.

Ces quelques explications neurophysiologiques ont été données pour comprendre que notre cerveau enregistre nos perceptions douloureuses, et, à force de répéter cette stimulation, un processus de renforcement du câblage neuronal s’opère. Nous avons dans notre corps et cerveau des mécanismes neuronaux qui permettent l’entretien et la mémorisation de la douleur.

Ces mécanismes s’activent-ils lorsque la mémoire des évènements traumatiques surgit à l’improviste dans notre tête renforçant encore et encore la chronicité des douleurs ?

(1) Jasson, Marie Claire. Mieux diagnostiquer et connaitre la fibromyalgie par l'étude de la symptomatologie clinique. 2001-2005.

(2) OMS, Oganisation Mondiale de la Santé -. www.who.int. www.who.int. [En ligne] http://www.who.int/gho/fr/.

(3) Calvino, Bernard. Pourqoui al douleur reste en mémoire. Cerveau et Pyscho N° 85. Février 2017, pp. 40-45.

(4)  Lefaucheur, Jean Pascal. Activer les neurones pour calmer la douleur. Cerveau et Psycho. Février 2017, p. 46.

(5) Zhuo, Frode Willoch - Min. Pourqoui la douleur reste en mémoire. Cerveau et Psycho. Février 2017, pp. 40-45.

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